AVANT-PROPOS

PROTÉGER
© Bjorn Holland / Getty Images / WWF

ROSELINE C. BEUDELS-JAMAR DE BOLSÉE

Présidente du Conseil d’Administration du WWF-Belgique

ANTOINE LEBRUN

Directeur général du
WWF-Belgique

PROTÉGER NOTRE SEULE ET UNIQUE MAISON, LA TERRE

Apparu sur cette même planète il y a 200 000 à 300 000 ans, Homo Sapiens, notre espèce, a connu une destinée exceptionnelle. Alors que nos plus proches cousins biologiques, les grands singes, comptent aujourd’hui environ 200 000 individus, notre espèce a dépassé les 7 milliards d’individus… pour 2,5 milliards en 1950 et plus que probablement 10 milliards à l’horizon 2050. À ce défi démographique s’ajoute l’adoption globale d’un mode de vie à l’occidentale extrêmement vorace en ressources naturelles : utilisation massive d’énergie (transport, chauffage, climatisation, etc.), consommation démesurée de protéines animales (principalement l’élevage et la déforestation qui l’accompagne), etc. Ces facteurs sont les principaux enjeux qu’il faut affronter si nous voulons léguer une planète vivante à nos enfants.

Car la publication de notre Rapport Planète Vivante en 2016 posait des constats inquiétants pour l’état de la biodiversité dans le monde : une perte de 58 % des populations de vertébrés en 40 ans et une projection de perte à 67 % à l’horizon 2020. De quoi nourrir la thèse de plus en plus matérielle qu’Homo Sapiens serait le principal responsable de la sixième extinction de masse. Un épisode dont la biodiversité pourrait mettre des millions d’années à se remettre. Au moment d’écrire ces quelques mots paraissait dans la revue BioScience une tribune intitulée “World Scientists’ Warning to Humanity : A Second Notice”. Dans cette tribune, plus de 15 000 scientifiques de 184 pays nous « mettent en garde contre la destruction rapide du monde naturel et le danger de voir l’humanité pousser les écosystèmes au-delà de leurs capacités à entretenir le tissu de la vie ».

Et dans tous les domaines, les signes d’épuisement de la Terre se multiplient de façon inquiétante. À la fin du mois d’octobre 2017, une étude allemande mettait en émoi la communauté scientifique en suggérant un effondrement de 80 % des populations d’insectes volants au cours des 30 dernières années au sein des zones naturelles protégées ! Des chiffres qui sont probablement similaires dans toute l’Europe. Au Royaume-Uni, on parle d’ailleurs de “windshield phenomenon” pour évoquer la quasi-disparition des impacts d’insectes sur les pare-brise lorsqu’on roule sur les autoroutes. Les forêts ont perdu 1,2 milliard de km2, principalement au profit de l’agriculture et des plantations. En 25 ans, les zones mortes dans les océans et les mers ont crû de 75 %. Les mers de plastique ont fait leur apparition et font des ravages dans de nombreux endroits à travers le monde (“World Scientists’ Warning to Humanity : A Second Notice”, BioScience, nov. 2017).

Et pourtant, nous faisons partie intégrante de la nature. En prendre conscience est probablement la première étape à franchir pour sortir de cette logique autodestructrice. La seconde étape est pour nous de construire des solutions qui permettent aux êtres humains de vivre en harmonie avec la nature. C’est la raison d’être de nos projets de terrain. Vous trouverez dans ce rapport de nombreux exemples de ces projets que nous menons à travers le monde et dont les objectifs sont toujours de préserver voire de restaurer la biodiversité tout en impliquant les communautés locales et en générant des bénéfices pour ces dernières. Mais pour inverser la tendance de la perte de biodiversité, nous nous battons aussi au quotidien pour que les gouvernements et les grands acteurs économiques prennent en compte l’impact de leurs décisions sur la nature. Et afin que notre voix soit entendue, il est essentiel que l’opinion publique se mobilise massivement pour la protection de notre planète.

Plus que jamais, nous avons besoin de vous pour sauver notre seule et unique maison, la Terre !